14 Février 2024
Mon tout premier sursaut politique remonte à l'année 1986, lors de la fameuse grève des étudiants contre la loi Devaquet. Ces manifestations étaient si marquantes, avec la triste disparition du jeune Malik Oussekine.
Dans ma famille, la politique n'était pas vraiment un sujet de conversation, mais lorsque les adultes abordaient ces sujets lors des repas familiaux, je ne pouvais m'empêcher de m'y mêler, laissant de côté mes occupations. J'étais comme hypnotisé par ces discussions... Ensuite, j'ai eu envie de rencontrer ces hommes qui me fascinaient tant lorsque je les voyais à la télévision. J'ai eu la chance de croiser Philippe Séguin à l'époque où il était maire d'Épinal (dans les Vosges), Dominique Gros, ancien maire de Metz (en Moselle), et Jean-Pierre Masseret, sénateur et secrétaire d'État lors de la cohabitation entre Jacques Chirac et Lionel Jospin.
C'est dans le froid glacial de l'Est de la France, en plein bouleversement de l'industrie sidérurgique, que j'ai fait mes premières armes en tant que militant. J'ai toujours lutté contre les injustices, peut-être parce que j'en ai trop vu. Mes parents se tuaient à la tâche pour récolter les fruits de leur travail, et pourtant, ils étaient extrêmement pauvres. Ils ont vécu toute leur vie dans la misère. Étant jeune, je trouvais cela tellement injuste que ça a sûrement favorisé ma transformation en travailleur social.
C'est ainsi qu'en hiver 86, je me suis retrouvé dans un cortège de manifestants étudiants à Metz... Je manifestais avec une énergie débordante, quand un homme en costume-cravate, à l'air sûr de lui, a pris la parole. Ses discours contre la loi Devaquet étaient remplis de métaphores et d'espoir. Ses phrases sur l'espoir de la jeunesse et notre avenir ont su canaliser la foule. Depuis ce jour-là, je savais que mon engagement politique serait une lutte acharnée, que le peuple devrait s'occuper de la politique avant que la politique ne s'occupe du peuple.
J'ai rencontré des personnes qui ne faisaient aucune distinction négative, que l'on soit pauvre ou jeune.
Pour continuer sur ma lancée, j'ai rejoint les Jeunes Socialistes. Je me suis rendu seul à la permanence du sénateur de Moselle, Jean-Pierre Masseret, alors que je n'avais que 17 ans. Cette rencontre a complètement bouleversé ma vie. Je sortais tout juste de l'adolescence et j'étais stupéfait par le charisme naturel qui émanait de Jean-Pierre. J'ai vécu cette rencontre comme une véritable chance. J'ai rencontré des personnes qui ne faisaient aucune distinction négative, que l'on soit pauvre ou jeune. Ils se rassemblaient simplement pour réclamer un moyen de subsister et une façon plus humaine de traiter les difficultés des citoyens.
À travers cette rencontre, j'ai commencé à mettre en pratique mes premières armes de militant et j'ai découvert l'éducation populaire (qui consiste principalement à promouvoir des formes d'enseignement en dehors des structures traditionnelles).
Ma famille, mes amis ne comprennent pas mon engagement. Ils ont même essayé de me dissuader. J'ai parfois eu droit à des commentaires du genre "la politique n'est pas de ton âge", "j'en ai marre, tu ne parles que de ça" ou "la politique, ce n'est pas pour des gens comme nous". Je n'y prête pas attention.
Fils d'ouvrier de la sidérurgie, issu d'une famille très, très nombreuse avec 6 sœurs, 3 frères et 2 familles recomposées, je fais également partie de la communauté des gens du voyage "Manouche". Je savais donc que je ne pourrais jamais faire carrière en politique, je n’avais pas réseau et pas d’argent... Je n'avais pas les codes d'une société bien-pensante. On me rappelait souvent que je n'avais pas tous les critères, et sûrement pas les codes, pour réussir en politique.
Depuis 1986, je milite et participe à toutes les élections. J'ai même été candidat à certaines d'entre elles. À chaque fois, cela me renvoie à mon histoire, à mon parcours. Mais je suis fier de ce parcours professionnel et politique. Je suis fier de mon histoire personnelle et du chemin que j'ai emprunté. J'ai toujours comme principe l'intérêt général.